Sous l’occupation

Par contre, un ouvrage « Un réseau d’évasion dans l’Oise à Auneuil » d’Henri Maigret nous apprend que quelques habitants de Blacourt ont prêté main forte à la Résistance, au péril de leur vie.

Cet épisode permet d’apercevoir quelques traces de la vie à Blacourt sous l’occupation.

En effet, l’auteur de ce récit était instituteur à Blacourt. Henri Maigret 20 ans en 1943, appartenait au réseau d’évasion Alsace qui a permis le passage en Espagne d’un certain nombre de français et le sauvetage d’environ 120 aviateurs alliés. Son pseudo était « Bébert » et il travaillait avec son chef Gilbert Thibault huissier à Auneuil, fondateur du réseau en 1943, Roger Fontaine d’Ons en Bray et Yvonne Delplanche. Les parents d’Henri avaient une ferme à Lhéraule et son beau-frère Gaétan Hucleux en avait une à Goulancourt-Senantes.

Le 6 septembre 1943 (à l’époque, les écoliers étaient encore en vacances) des B17 « forteresses volantes » américaines passent au-dessus de la région et l’un des bombardiers s’écrase vers Lanlu. Le pilote est tué et une dizaine de parachutistes « descendent » du ciel. Les plus proches tombèrent à Amuchy et Blacourt. En fin de journée, la sœur d’Henri, Fernande Hucleux et la bonne polonaise Frotzina vont traire dans une pâture au lieu-dit « Le Bray de Goulancourt ». Elles trouvent dans la grange un aviateur américain blessé. Les deux femmes le nourrissent et le soignent. A Blacourt, malgré une relative pénurie, on mangeait à sa faim mais on souffrait de l’absence des prisonniers. Henri le prend en charge et l’amène dans sa classe (de nuit bien sûr) au centre du village. Sa classe a été aménagée à la hâte, à la rentrée d’octobre 1942 dans la salle à manger de l’ancien presbytère depuis longtemps inhabité. Il se trouve au fond de la cour de l’école close par de hauts murs qui l’isolent de la rue (ce qui est pratique pour cacher un clandestin). Son collègue, Armand Dubromel, occupe le logement de fonction de l’autre côté de la cour et utilise comme dépendances, le reste du presbytère où il a aménagé un poulailler et des clapiers. Mis au courant par Henri, il aida à nourrir l’aviateur.

D’autres parachutistes eurent moins de chance, l’un d’eux a atterri sous le nez des allemands à La Chapelle aux Pots et fut donc arrêté. Les autres se sont égayés.

Le fait de cacher un aviateur allié était extrêmement dangereux, on risquait l’arrestation, parfois la torture, l’exécution ou la déportation. Il fallait trouver une filière pour le convoyer jusqu’à Paris et de là par d’autres réseaux, faire en sorte qu’il retourne en Angleterre. La formation des aviateurs était longue et coûteuse, aussi les alliés tenaient-ils à récupérer leurs hommes tombés en France (ou ailleurs).

Henri finit par entrer en relations avec une organisation. Un certain « Zéphyrin » vient le voir. C’est Fernand Dupetit, serrurier à Beauvais, chef d’un groupe de Résistance, qui va s’occuper du transfert. Voyage compliqué et dangereux. Il fallait trouver des tenues civiles à ces garçons de grande taille… . En octobre 1943, Marcelle Petit épouse de Marceau Petit, un ancien de 1914/1918 blessé à Verdun et qui travaille à Gournay en Bray vont l’aider. Ils habitent une maison de Blacourt, près de la mare, en face de la forge. Cette femme s’adresse à Henri Maigret, mue par une intuition car elle a récupéré un autre parachutiste, planqué dans une grande cheminée fermée, transformée en placard.

Zéphyrin revient et le 9 novembre 1943, l’emmène et cet aviateur est pris en charge à Paris par le réseau Comète.

Là va s’arrêter l’évocation de Blacourt sous l’occupation, car après cette action, très vite Henri Maigret est convoqué pour Le STO (Service du Travail Obligatoire en Allemagne). Il n’a pas l’intention d’honorer la convocation. Il demande à son collègue Dubromel de faire croire au village qu’il a été arrêté à la sortie d’un cinéma à Beauvais et il plonge dans la clandestinité. Henri va désormais travailler avec le réseau de Gilbert Thibault à Auneuil, puis à la Libération, il est appelé à l’armée (classe 1943) et fut démobilisé en mars 1946. Il reprit sa carrière d’instituteur mais pas à Blacourt.