Résumé de l’affaire « Le crime de Blacourt ». (Daphné Guillemette)
Nous sommes le 27 novembre 1923 à Blacourt.
A cette époque, Blacourt comptait, d’après le recensement de 1921, 379 habitants, en additionnant ceux du village centre, et la « population éparse », c’est-à-dire les hameaux comme La Haute Rue, l’Avelon, Montreuil, les Landrons, le Bray de Haute Rue, le Bray de Montreuil et La Boissière.
Massire était maire du village et avait pour adjoint M. Duval.
Fulgence Desmarest était maître de l’école des garçons et Gabrielle Bruno dirigeait celle des filles.
C’est à priori un village tranquille dans lequel la population exerce des métiers essentiellement liés à l’agriculture. Environ 117 agriculteurs, beaucoup de femmes sont ménagères, on trouve un charretier, 2 charrons, un marchand de veaux mais aussi un certain nombre d’ouvriers d’usines et des ouvriers potiers et céramistes, ce qui n’est guère étonnant dans notre région. Blacourt possédait également une carrière d’où on extrayait la pierre.
En ce qui concerne les commerces, il y avait au moins une boulangerie, une épicerie, une marchande de brosses etc.
Daphné Guillemette nous parle dans son ouvrage d’un hôtel près de la gare, d’un petit restaurant à l’arrêt de Blacourt et de débits de boissons.
Mais, après cette brève présentation, revenons au 27 novembre 1923. Je résume ici l’histoire racontée par Mme Guillemette.
Clovis Théophile Lambert, 44 ans, est garde-chasse. Il a été embauché par M. Cantrel, propriétaire. Celui-ci l’a engagé en tant que garde particulier pour s’occuper de ses propriétés situées dans le bois de Blacourt où M. Cantrel venait chasser avec ses amis.
Clovis avait encore son père, âgé au moment des faits de 70 ans, il avait épousé en 1902 Marie-Louise Grouchy décédée en 1922. Le couple avait eu un fils prénommé également Clovis, âgé de 16 ans et ils habitaient Espaubourg. Au moment du crime Clovis Théophile avait une nouvelle compagne prénommée Rosella.
Ce mardi 27 novembre il faisait froid, la neige commençait à tomber. Le garde-chasse comptait poser des pièges dans le bois.
En fin d’après-midi, en ces lieux où on l’a retrouvé 3 jours plus tard, couché sur le dos, Clovis Lambert fut tué d’un coup de feu, à l’arrière de la tête.
Le commissaire Léon Carré de Beauvais est dépêché sur les lieux et s’installe dans la caserne de gendarmerie de Blacourt.
Clovis a-t-il surpris un braconnier ? On sait que son employeur lui avait fait des reproches sur ses fréquentations (il buvait des pots avec des gens dont on savait qu’ils étaient braconniers). Ces remarques l’avaient affecté. Il se devait donc d’être plus sévère dans son travail et moins conciliant.
Au début de l’enquête du commissaire Carré, 3 noms se détachent comme pouvant être celui de l’assassin potentiel : Rozé, filleul de la victime et braconnier à ses heures, tout comme Mercier et Leleux pour les mêmes raisons.
Rozé paraissait être un bon candidat dans la mesure où un bruit avait couru dans le village selon lequel Clovis était souvent venu voir Marthe, la femme de son filleul pendant une absence de 2 mois de celui-ci.
Mercier, manouvrier, marié et père de 2 enfants avait un casier judiciaire mais cela n’en faisait pas un assassin.
Les 2 furent vite éliminés de la liste du commissaire.
Joseph Leleux paraissait être un client plus sérieux. Clovis lui avait dressé un procès-verbal quelques mois avant sa mort et son alibi était problématique. Dans sa jeunesse il avait commis quelques délits. Leleux avait donné un faux emploi du temps et il assurait qu’il n’avait plus mis les pieds dans le bois de Blacourt depuis 2 ans. Le jour du crime, Il prétendait être allé chasser le lapin, puis être passé au château où il était entré par effraction, enfin, dans l’après-midi il aurait à nouveau chassé avant de travailler à la carrière. Or il a été aperçu se dirigeant vers le bois une demi-heure avant le crime, 2 témoins l’affirment mais il le nie.
Le fusil et les cartouches retrouvés chez lui correspondaient à l’arme du crime.
Avec ces éléments, le commissaire Carré fait arrêter Joseph Leleux le jeudi 6 décembre 1923. Il est inculpé d’assassinat et conduit à la prison de beauvais. Ceci malgré ses dénégations.
Le procès a lieu à la Cours d’assises de beauvais le 13 mars 1924.
Maître Gilles, son avocat commis d’office est une pointure. Avec beaucoup de conviction et de talent, il démonte complètement les résultats de l’enquête. Pour lui, pas d’aveux, pas de témoignages directs, pas de preuves matérielles, que des hypothèses et des suppositions. Instillant le doute dans l’esprit des jurés, maître Gilles obtient l’acquittement et la libération de son client.
L’affaire de l’assassinat du garde-chasse Lambert ne fut jamais éclaircie. Quelques mois après sa mort, par souscription, les populations de Blacourt et d’Espaubourg firent élever dans le bois une stèle en sa mémoire.
Dans cette affaire, l’auteur évoque la caserne de gendarmerie de Blacourt. Nous n’en avons trouvé aucune trace. Peut-être s’agissait-il de la « caserne des pompiers » qui fut utilisée à cette fin.