Détails
- Auteur
- Véronique Decayeux
- Année
- 2023
Introduction
Notre ambition n’était pas d’écrire l’histoire de Blacourt, le site de la mairie en propose déjà une très riche, mais plutôt de retrouver les traces de la vie dans ce village au XIXè s. et lors de la première moitié du XXè. Il s’agit donc davantage d’une présentation de résultats de recherches, effectuées aux Archives Départementales de l’Oise, dans les recensements de population et les compte rendus de réunions de conseils municipaux.
Ce résumé se présente sous forme de rubriques : les recensements, l’école, les instituteurs (trices), les élections, les pompiers (eh oui, il y eût une caserne à Blacourt), la Boîte aux lettres, le cimetière, la 1ère guerre mondiale, le monument aux morts, le crime de Blacourt, et enfin la 2ème guerre mondiale.
Des erreurs, des oublis se sont probablement glissés par méconnaissance ou manque d’archives et nous en prenons l’entière responsabilité. Les signaler et apporter d’autre renseignements permettraient d’abonder ces épisodes de la vie à Blacourt.
Nous formons le vœu que cet écrit puisse intéresser les blacourtois(es) et qu’ils y retrouvent éventuellement, des traces de leurs aïeux.
Le nom du village
Le nom du village a connu une certaine évolution au cours des âges. D’après l’ouvrage d’Emile Lambert court en latin signifie ferme puis domaine rural puis village. Ces termes en court date de l’époque mérovingienne voire même de la fin du IVème siècle (époque de défrichements et de mise en culture du sol). Vers 1152 on évoque Blaacurtis puis Blaacort en 1242, Blaacurt puis en 1263 Blaencuria…
Les recensements de population
Les recensements de population, même s’ils ne sont pas toujours d’utilisation aisée, sont une véritable mine de renseignements. Nous y trouvons l’évolution chiffrée du nombre d’habitants mais aussi leurs métiers et cela dessine une partie de l’histoire du village. L’analyse n’est pas toujours simple car certaines dénominations changent, comme par exemple pour les domestiques : sont-ils des gens de maisons ou des commis de fermes (c’est le cas le plus fréquent) ou encore nous voyons apparaître au recensement de 1921 55 ménagères…dont on ne parlait pas avant. S’agit-il de femmes au foyer ou d’épouses de cultivateurs ou d’artisans ? On sait que les femmes n’étaient pas déclarées dans ces ménages. D’anciennes professions apparaissent puis disparaissent. Blacourt comptait en 1886 un cantonnier de Chemins de Fer et des gardes-barrière, un cocher, un voiturier, 2 nourrices, des couturières. Puis en 1896 apparaissent des brossières, en 1931 un bourrelier, plus tard un maréchal-ferrant, un marchand de veaux, un marchand de biens… un meunier car il y avait 2 moulins à eau (celui d’Avelon et de la Boissière). Métiers qui disparaissent dans les derniers recensements.
Nous avons choisi d’étudier les recensements de 1886 à 1931.
1886 pour avoir une image du village à la fin du XIXè siècle, puis de l’avant- première guerre mondiale et ce jusqu’en 1936. Il eût été intéressant d’avoir au moins les deux premiers recensements de l’après seconde guerre mondiale. Cependant les archives départementales n’ont numérisé ces comptages que jusqu’en 1936. Les recensements ont lieu tous les cinq ans. Pendant la guerre 1914-1918 celui de 1916 n’a pas été fait, et après la guerre de 1939-1945 il faut attendre 1946 pour que cela reprenne.
Cela étant dit, les renseignements sont d’une grande richesse.
Intéressons-nous d’abord au nombre d’habitants. Il totalise (et on fait la distinction entre le village-centre et les hameaux dont certains ne comportent qu’une ou deux fermes) le centre du village et les hameaux. En 1881 les « écarts » comme ils sont appelés ou « populations éparses » sont : La Haute Rue (27 maisons), l’Avelon (11 maisons), Montreuil (10 m.), Les Landrons (5 maisons), Le Bray de la Haute Rue (2 maisons), le Bray de Montreuil, le Méhet, la Boissière et Le Bois des taillis avec chacun une maison. Un ensemble de 203 habitants auquel on ajoute les 221 de la « population agglomérée » du centre soit un total de 424 individus.
Ce chiffre va se maintenir jusqu’au comptage de 1901 où l’on constate une première baisse avec 409 habitants puis une baisse plus significative en 1911 avec 363 individus. Est-ce à mettre en rapport avec une légère augmentation du nombre de personnes travaillant dans le tertiaire (22) et donc moins de cultivateurs ? Quoi qu’il en soit jusqu’en 1936, on ne trouve plus une population supérieure à 400 habitants. .Après la guerre de 1914-1918 les « effectifs » remontent à 388 pour se maintenir jusqu’en 1931 (354 hab.) et pour redescendre à 295 en 1936. Au niveau national, c’est la période creuse sur le plan démographique, liée entre autres à la baisse des naissances imputable à la première guerre mondiale. Peut-être cela touche-t-il Blacourt. Il semblerait aussi pour le village que les ouvriers d’usines soit moins nombreux, peut-être ont-ils déménagé ? C’est une hypothèse.
Les recensements nous donnent une photographie (pas toujours très précise mais quand même) des activités de la population. Le problème, déjà évoqué, étant que la plupart du temps on ne donne que le métier du chef de famille, or nous savons que les femmes travaillaient aussi avec leur époux à la ferme, dans l’atelier ou dans le commerce.
Le secteur qui arrive en tête à Blacourt, ce n’est pas un scoop, est celui du primaire. Il comptabilise les métiers liés à l’agriculture, à la mine et à la sylviculture. Ce secteur est largement en tête jusqu’en 1911. Il le reste ensuite mais se voit rattrapé par le secondaire. En effet si la plupart des habitants sont cultivateurs, on trouve à Blacourt un certain nombre d’ouvriers en céramique (18 en 1886), d’ouvriers en carreaux (chez un certain Colin), d’ouvriers potiers, 25 ouvriers d’usine en 1921 chez un Lecacheur, ou encore en 1931 des ouvriers de fromagerie (celle de La Chapelle aux Pots).
Blacourt compte aussi, comme c’était le cas dans au XIXè siècle et ce jusqu’à la seconde guerre mondiale, un certain nombre de rentiers. Femmes comme hommes, ils étaient 8 en 1886, 12 en 1896 puis jusqu’en 1936, leur nombre tomba à moins de 4. Ce phénomène se constate également sur le plan national. La terre rapportait moins et les grandes familles riches disparaissaient peu à peu de Blacourt.
Nous avons donc un village d’agriculteurs mais où l’on trouve également beaucoup d’ouvriers d’usines liés au travail de la poterie dans cette région du pays de Bray.
L’école
Si l’on remonte à la Révolution, celle-ci conçoit un service public affranchi de la tutelle de l’Eglise, uniformément réparti et gratuit. Condorcet ne disait-il pas :
« Puisque l’instruction doit être généralement la même, l’enseignement doit être commun, et confié à un même maître qui puisse être choisi indifféremment dans l’un ou l’autre sexe » (« Premier Mémoire »).
Il défendait les idées très novatrices de gratuité, d’obligation et de laïcité. Cependant il fallut un siècle pour voir ces idées mises en pratique, et encore…
L’Etat, en cette fin du XVIIIè siècle, n’avait ni les finances ni le personnel nécessaire pour fonder un service public. Selon l’historien Antoine Prost « L’Etat s’en remet donc aux initiatives locales ou particulières du soin de fonder des écoles ».
Le propos ici n’est pas de faire l’histoire de l’enseignement mais d’exploiter les renseignements glanés dans les archives du conseil municipal de Blacourt.
Chronologie
Voici une courte chronologie des éléments trouvés.
Dès 1829 on trouve une demande du maire à la Préfecture pour louer à Blacourt une « maison d’école » qui appartiendrait à un Monsieur Bénard. Hélas, nous n’avons pas la réponse du préfet mais en 1844 on évoque la location d’une chambre à l’instituteur et en 1859 les archives parlent de l’achat des locaux de la maison d’école et de réparations à effectuer. Le conseil municipal est donc attaché à l’idée d’instruction.
En effet, en 1858, un document nous explique, je cite, que cette « maison d’école » est « contiguë au presbytère, à proximité de l’église située dans la Grande Rue, qu’elle est construite en pan de bois, couverte en tuiles, en assez bon état mais pas à l’intérieur. Le conseil municipal est d’avis pour améliorer le logement de l’instituteur d’utiliser le grenier, de faire disposer dans son étendue plusieurs chambres et une salle de mairie. »
Nous trouvons également une lettre du préfet au maire, datée du 6 octobre 1859 qui l’autorise à accepter au nom de la commune, « la donation par Monsieur l’abbé Moreau, suivant acte publié les 17 mars et 27 juin 1859, d’une maison avec dépendances pour devenir l’école des filles ». En contrepartie l’abbé reçoit une rente viagère et exige que l’enseignante soit une religieuse de l’ordre de Saint Aubin : Jouxte Boulleng.
Il est tout à fait intéressant de voir évoquer en 1866 une classe d’adultes le soir. Il semblerait qu’elle ait compté à un moment donné 10 garçons de plus de 18 ans. Certains revoient ce qu’ils avaient oublié et pour les autres, il s’agit d’apprendre des choses qui se rapportent à la profession qu’ils veulent embrasser. Les matières étaient l’arithmétique (opérations pratiques), le système métrique pratique, l’orthographe pratique, les notions élémentaires sur la mesure des surfaces et des solides.
Cependant on ne connait pas la qualité de l’enseignant et pas davantage la durée de vie de cette classe, mais enfin elle a existé.
Ensuite, il est fait mention d’une lettre de l’inspection de l’Oise, Académie de Paris. Effectivement, si une Académie d’Amiens a pu exister de 1808 à 1848 (avec pour départements, donc inspections, la Somme, l’Oise et l’Aisne) elle disparait pendant plus de 110 ans. La Somme fut rattachée à Douai puis Lille, l’Aisne à Reims et l’Oise à l’Académie de Paris. L’académie que nous connaissons actuellement ne fut restaurée qu’en 1964.
Cette lettre de l’inspection de l’Oise, donc, datée de 1878 fait état d’une école des garçons (ancienne maison de culture acquise en 1835…) et d’un logement tous deux humides et regrette que les « lieux d’aisances » ne puissent être surveillés. Quant à l’école des filles, elle est jugée trop petite car elle devrait accueillir 18 élèves au lieu des 32 qui la fréquentent. L’Inspection demande à ce que ces écoles soient reconstruites. Le Maire est outré et refuse dans sa réponse qui intervient en 1880… L’inspecteur se plaint au préfet.
En dehors des problèmes posés, cela signifie donc qu’en 1878, il y avait à Blacourt une école des garçons (est-ce la même que celle évoquée vers 1858/1859 ?) mais également une petite école de filles.
En dépouillant les archives toujours d’une manière chronologique, on constate qu’en 1882 la mairie acquiert la maison Bloquet. (Nous rappelons que la loi Ferry de 1881 impose la gratuité de l’enseignement primaire et celle de 1882 l’obligation et la laïcité).
Cette maison Bloquet est constituée de deux immeubles acquis par la voie des enchères, ceci pour faire une école des garçons en 1884. Cependant il est décidé que « dans le cas où, à raison de la décroissance de la population, l’école des filles serait supprimée, l’école des garçons serait rendue mixte ». Ceci n’est pas très clair et il faudrait trouver d’autres sources car ensuite les archives du conseil nous informent qu’en 1886 la maison Bloquet est donnée au presbytère et donc l’ancien presbytère devient une école… où il n’y a ni cour ni toilettes…
En 1913, la population scolaire ayant diminué, l’école des garçons fut transformée en école mixte et une nouvelle construction fut projetée. Donc, en 1913 il n’y a plus qu’une classe avec 21 filles (poste supprimé car l’institutrice, infirme et malade prend sa retraite), 25 garçons soit 46 élèves ayant une fréquentation de l’école très irrégulière. Ceci pour une population de 363 habitants.
La guerre de 1914/1918 met un coup d’arrêt à ces projets de construction par manque de moyens financiers. En 1924, la décision est prise d’agrandir l’école des garçons et le conseil municipal décide en 1935/1936 de faire des travaux de restauration du logement de l’instituteur.
La fréquentation de l’école
Les registres matricules d’appel nous renseignent, même si c’est de manière lacunaire, sur la fréquentation de l’école des garçons de 1861 à 1884. On note le « comptage de l’école des filles » seulement en 1882 donc après les lois Jules Ferry. Nous pouvons, à titre d’exemple, détailler celui de 1861.
L’instituteur qui produit cet « état des lieux » sur toute la période est François Godo qui vient d’être nommé dans la commune et le maire qui signe le registre est M. Hoeppe.
Pour une population de 553 habitants, ce document comptabilise 61 garçons dont 53 sont des élèves payants nous sommes en 1861) et 8 sont à l’école gratuitement. En réalité 5 enfants du village n’ont pas fréquenté l’école donc le nombre des élèves en âge scolaire aurait dû être de 66. Ensuite nous avons le nombre de mois et d’élèves présents en classe : 7 élèves (dont 1 gratuit précise-t-on) ont suivi la classe pendant 11 mois, 8 pendant 10 mois, 6 pour 9 mois, 11 pour 8 mois, 4 pendant 7 mois, 4 pour 6 mois , pour 5 mois, 9 pour 4 mois, 5 pour 3 mois, 2 seulement 1 mois et 1 n’est allé à l’école qu’un seul mois.
Sur l’année 1866 François Godo note une fréquentation moyenne de 8 mois pour une population de 514 habitants, 54 enfants d’âge scolaire dont 43 furent présents parmi lesquels 37 payants et 6 gratuits.
Si nous prenons l’année 1882 nous avons enfin les chiffres concernant les filles. L’école était dirigée par E. Debout avec pour suppléante Mme Praxède. Il y avait 27 filles de 6 à 13 ans et 19 garçons soit 46 élèves pour 398 habitants.
Il faudrait pouvoir comparer avec un autre village ayant les mêmes caractéristiques pour tenter d’analyser ces chiffres. Cependant, il nous semble que le nombre d’élèves scolarisés et la fréquentation de l’école étaient corrects.
Nous savons que beaucoup d’enfants ont connu une scolarité hachée et de courte durée surtout avant 1881-1882. Cependant, certaines situations ont bien sûr perduré même après l’obligation et la gratuité. Cette dernière fut un acquis indéniable car elle rendait les choses plus justes mais nous constatons que des élèves ont fréquenté l’école gratuitement. Par contre nous ignorons combien de mois dans l’année et surtout les conditions dans lesquelles cette scolarité s’est déroulée (humiliations, vexations…). Un document sur les bénéficiaires de cette gratuité, rempli par les instituteurs M. François puis M.Godo donne quelques détails sur la situation des parents. On les dit indigents ou ayant peu d’aisance. On trouve des manouvriers, journaliers, couturière (une femme élevant ses enfants seule) et autres charretiers. En 1864 sont inscrits 8 filles et 6 garçons admis gratuitement dont 3 enfants de l’hospice de Beauvais.
Même avec l’obligation scolaire, Blacourt voit, comme beaucoup de communes rurales, la fréquentation de l’école perturbée car les enfants en novembre sont encore occupés à garder les bestiaux et ils aident leurs parents pour les travaux des champs selon la saison. Enfin, certains documents font état d’absences d’enfants des hameaux à la mauvaise saison, mettant en cause l’état des chemins et le mauvais temps qui empêchent de se rendre au centre du village.
Les instituteurs
Au fil de certains documents nous avons donc vu passer d’abord un François Louis né le 2 avril 1818 à Domelliers nommé à Blacourt le 31 avril 1850, marié, père de quatre garçons et trois filles, qui resta instituteur dans la commune pendant 8 ans. C’est lui qui en 1852 fait la liste des élèves admis gratuitement à l’école. Puis surtout Godo François nommé en 1861 et dont on trouve la trace jusqu’en 1881, enseignant à Blacourt au minimum 20 ans (nous n’en savons pas plus faute de dossier professionnel). Nous n’en apprenons pas davantage sur son adjoint, un nommé Bouffet apparaissant en 1876 jusqu’en 1881. Nous avons croisé également Mesdames Debout et Praxède en 1882.
Grace aux recensements (donc de 1881à 1936), nous avons pu trouver quelques noms d’instituteurs ayant exercé à Blacourt. Pour certains, nous avons consulté leur dossier professionnel.
Ainsi évoque-t-on le passage durant 1 mois en 1882 de Crochu Théophile âgé de 40 ans et veuf.
Au recensement de 1896 apparaissent d’une part, Gallet Anaïse née le 7 juin 1871 en Eure et Loir qui fut de la promotion 1888/1891 à l’Ecole Normale de Beauvais. Stagiaire à Verneuil puis à Blacourt à compter du 14 octobre 1892, titularisée, elle décède dans ce village le 19 mars 1899. Une stèle à son nom est encore visible dans le cimetière de la commune. D’autre part, Demarest Fulgence né le 16 mars 1863 à Litz, marié, qui arriva comme suppléant le 16 mars 1888 puis qui fut instituteur titulaire et que l’on trouve jusqu’au recensement de 1921. On mentionne en 1921 une autre collègue Patoulet née Bruno Gabrielle qui vit le jour le 9 juin 1889 à Boury et fut nommée à Blacourt le 1er octobre 1920 où elle resta jusqu’en 1930.
Le recensement de 1926 évoque Letellier Raymond et Thioux Marie-Antoinette. Le premier est né à Méru le 16 février 1903, arrive au village le 8 mai 1925 qu’il quitte en septembre 1926.
Quant à Laubard née Marie-Antoinette Thioux dite Marthe, divorcée, arrive à Blacourt âgée de 35 ans en 1922 et en repart en 1927. Elle semble ne pas avoir eu de bonnes relations avec tous les parents d’élèves.
Un couple va enseigner dans le village : Desesquelles Martial né le 13 août 1902 à Therdonne, promotion 1919/1922 à l’Ecole Normale de Beauvais arrive titulaire à Blacourt en 1926. Marié à Gallot Mélanie, née le 17 juin 1905 à Beauvais, promotion 1921/1924, arrivée à Blacourt en octobre 1927. Ils ont deux enfants nés à Blacourt et quittent le village le 1er octobre 1934.
Enfin, un autre couple, prend la suite : Huart Jacques né le 15 janvier 1912 à Tracy-le-Mont, promotion 1928/1931, arrivé à Blacourt le 1er octobre 1934 ainsi que son épouse (mariés en 1931) Fontaine Yvonne, promotion 1922/1925. Ils sont parents de 3 enfants et repartent le 1er octobre 1937.
Les élections
Un document des Archives Départementales de l’Oise nous donne la liste des maires, adjoints et parfois des membres du Conseil municipal de 1826 à 1912.
Par moment, lors de l’installation, nous avons quelques informations concernant le déroulement des élections ou nominations. Nous pouvons donner des noms mais il serait fastidieux d’en faire la liste. Ce qui parait intéressant est plutôt le mode électif. Ainsi en 1826, nous lisons qu’en remplacement de deux conseillers municipaux et du maire, le Préfet demande aux nouveaux nommés de prêter serment de fidélité au roi et obéissance à la Charte constitutionnelle et aux lois du royaume (Charles X étant roi de 1824 à 1830).
Le procès-verbal des élections du 12 octobre 1834 nous apprend que le scrutin a duré trois heures et qu’au premier tour la majorité absolue (la moitié des électeurs +un) est nécessaire pour la validation de l’élection. Le PV parle de 43 bulletins dans l’urne. Il faut rappeler que sous le roi Louis Philippe, une loi de 1831 rétablit l’élection des conseils municipaux par les citoyens les plus imposés de la commune. D’autre part, pour des petites communes comme Blacourt, c’est le Préfet qui désigne le maire et ses adjoints parmi les membres du conseil municipal.
Que ce soit comme maires, adjoints ou conseillers, certains noms apparaissent plusieurs fois durant cette période de 1826 à 1912 comme Bouffet Aimé, Hucleux Jean-Baptiste, Hoeppe Servais marchand de moutons (qui signait des documents avec François Godo pour l’école), le baron de Giresse, Cartier, Carré, Fontaine Théophile…
Les pompiers
A travers des documents concernant les « dépenses et subventions » de la commune de Blacourt, nous apprenons qu’elle était dotée d’un corps de sapeurs-pompiers. Nous ignorons quand il a vu le jour mais en 1842 on mentionne l’achat d’une pompe à incendie et la recherche d’un bâtiment pour la remiser (laquelle pompe a été changée en 1869). Puis en 1844 on évoque l’équipement des pompiers qui s’habillent à leur frais mais la commune leur achète 2 « sabres » probablement pour les parades et en 1845 on comptabilise vingt-deux pompiers. En 1886, Monsieur Caré, maire, propose la construction d’une remise de pompe à incendie à la Haute Rue (la première étant certainement louée ou vétuste). Ensuite le compte-rendu du conseil municipal parle de l’achat en 1892 de 21 vestes et en 1896 de pantalons, vestes et képis. Enfin en 1911 la commune dote les sapeurs-pompiers d’une échelle pliante et en 1926, on mentionne pour eux une indemnité individuelle. La dernière trace trouvée est l’annonce le 31 mars 1954 de la dissolution par le Préfet de l’Oise du corps des sapeurs-pompiers de Blacourt.
Postes et télégraphes
Au gré des comptes rendus des réunions du conseil municipal est citée la « boîte aux lettres mobile ». Il s’agit d’un système de boîtes accrochées aux wagons de Chemin de Fer des lignes secondaires. A chaque arrêt on relève ou dépose du courrier.
En ce qui concerne notre commune, en 1921, Monsieur Bérenger, maire, demande l’accord du conseil pour une somme d’argent destinée à compléter la redevance pour le service de la boîte aux lettres mobile, installée au passage à niveau de Blacourt-Espaubourg. Ce service est effectué par les agents des Chemins de Fer de la Compagnie du Nord.
Pour ce qui concerne les télégraphes, nous avons quelques éléments sur le colportage des dépêches pour le milieu des années 1920. En 1924, Monsieur Jardin est gérant de la cabine communale mais demande pour ce service une grosse somme. Le domicile de Génévré Cartier, charron de son état, se trouve sur le parcours des lignes téléphoniques et à environ trente mètres de la mairie. Celui-ci consent à assurer le service de réception des télégrammes chez lui et d’en faire la remise à domicile. Il devient donc le gérant de « la cabine téléphonique » et il est rémunéré par la commune pour ce service. Le fait d’habiter près de la mairie pèse lourd dans la balance. D’ailleurs, comme il quitte son domicile en 1928, il démissionne et madame Marie (ou Marié) débitante sur la place de la mairie le remplace et reprend la cabine chez elle avec Mélanie Mathé pour suppléante.
Cimetière et monument aux morts
Cimetière
Le premier cimetière était à côté de l’église, il en est fait mention lors de l’érection du monument aux morts. Puis, en 1871 François Kersent, propriétaire, (il fut membre du conseil municipal) fait une donation à la commune de 21 ares de terre au lieu-dit « Le champ Cornu » ( ?), sous la condition que ce terrain soit affecté à l’établissement d’un cimetière. Ceci sous réserve d’un emplacement de 10m2 pour servir à sa sépulture et celle des membres de sa famille.
Nous apprenons que le 2 septembre 1926, le conseil municipal décide d’établir un plan des concessions délivrées de 1873 à 1926 dans le cimetière communal. Il s’agit de faire un plan général du cimetière, lequel devra comprendre, outre l’emplacement des fosses communes, le détail des concessions, numéro à l’appui. Travail effectué par Monsieur Hoippe, instituteur retraité.
1914/1918
Les Anciens Combattants de la commune créent le 29 janvier 1921 un comité dans le but d’obtenir l’érection d’un monument dédié à leurs camarades morts durant la Grande guerre. Dans sa session d’août 1921, le conseil municipal de Blacourt a décidé de dresser sur le terre-plein de l’ancien cimetière tenant à l’église, le monument aux morts, fruit d’une souscription publique. L’autorisation est donnée par le Préfet le 11 août. L’édifice est en granite de Belgique, en forme de pyramide construit par Decostre Raoul, marbrier sculpteur demeurant à Gournay en Bray, monument auquel on ajoute une urne funéraire également en granite belge. Monsieur Massire, maire de Blacourt l’inaugure en 1922.
Cette guerre a durablement marqué la société française. Toutes les familles ont été touchées, cette génération d’hommes fut anéantie. L’historien Stéphane Audoin-Rouzeau, spécialiste de ce conflit parle de « cercles du deuil ». En effet, ce fut un massacre de masse et un deuil de masse. Combien de personnes affectées autour d’un mort à la guerre ? Difficile à dire : le premier cercle peut être formé de l’épouse, des enfants du défunt, de ses parents et grands-parents, de ses frères et sœurs. Le second cercle concerne ses oncles, tantes, nièces et neveux puis dans un troisième cercle on peut avoir les amis, les cousins, la famille éloignée. Lorsque l’on voit le nombre de noms gravé sur les monuments, on imagine l’impact que cela a eu sur le pays et plus particulièrement, pour ce qui nous concerne, sur Blacourt.
Vingt- trois noms sont gravés. Les évoquer tous est une façon pour nous de leur rendre hommage, et de deviner les drames qui se sont déroulés. Il y a certes la perte, la douleur intime, le deuil mais aussi les situations difficiles dont ont hérité les épouses devenues veuves avec parfois la responsabilité de jeunes enfants voire d’enfants posthumes…
La liste de ces soldats présente tout l’éventail des âges, les plus jeunes avaient dix- neuf ans et le plus vieux quarante-trois. L’année la plus meurtrière est 1917 et les lieux de décès se situe sur tous les fronts, l’Aisne et la Marne concernant respectivement six morts pour la première et quatre pour le seconde. L’un d’eux est décédé en captivité en Allemagne. Un réfugié a été inscrit : Camille Collet en 1916, nous n’avons aucun renseignement le concernant. Aucune information sur Angrand Jules ni à propos de Lefèvre Ernest. Parfois, certains n’habitaient pas Blacourt mais les parents y résidaient. Pour d’autres comme Raymond Dauboin, rien à priori ne le rattache au village et pourtant il doit y avoir une raison. Le cas est identique pour Adolphe Geffroy.
L’étude de ces fiches et de l’état civil (quand c’est possible) est donc riche d’enseignements sur le plan sociologique (métiers, âges au mariage, nombres d’enfants). On peut également observer (comme c’est souvent le cas à cette époque) les grossesses rapprochées et parfois la mort des très jeunes enfants.
Le site de « Mémoire des hommes » et celui des Archives Départementales de l’Oise permettent parfois de retrouver les traces de ces soldats morts pour la France. Modestement, nous avons voulu leur rendre hommage en présentant le fruit de nos recherches sur chacun d’entre eux. Peut-être, certains blacourtois découvriront-ils quelques renseignements supplémentaires sur leurs aïeux.
1914
Derivery Léon Louis Oscar né le 10/07/1882 à Blacourt est mort pour la France le 09/10/1914 à Rouvroy-en-Santerre dans la Somme. La transcription de son décès date du 14 septembre 1915 à la mairie de Blacourt. Il avait les cheveux et les yeux châtains (fiche militaire) et mesurait 1,65 mètre. Habitant ainsi que sa mère à Blacourt, cet ouvrier maçon s’était marié le 20 avril 1907 à Marie Fontaine, brossière âgée de 19 ans lors du mariage et résidant également à Blacourt. Le couple eut une première fille Rolande, née en 1908 et une seconde, posthume puisque née le 1er février 1915…
Horcholle Denis, inscrit comme étant disparu. Né le 15/05/1886 à Espaubourg et mort le 02/11/1914 à Soupir (Aisne) transcrit à Blacourt le 2 août 1920. Cheveux châtains foncé, yeux bruns, 1,60mètre, ce terrassier puis garçon laitier, résidant comme ses parents à Lalandelle, s’était marié à Blacourt le 26 décembre 1912 avec Gaëtane Miel, brossière de 19 ans (veuve à peine 2 ans plus tard). Un fils, Raymond, leur était né le 10 mai 1913.
Lecointre Ernest Hippolyte né le 25/04/1883 à Saint Germer de Fly, mort pour la France le 08/11/1914 à Vienne-le-Château (Marne) et transcrit à Saint-Germer de-Fly le 29 mai 1920. Châtain aux yeux gris bleus et mesurant 1,68 mètre, domestique puis employé de fromagerie demeurant à La Chapelle aux Pots, Ernest s’était marié à une cuisinière Jeanne Thierry le 7 juin 1913. Domicilié en dernier lieu à Saint Germer, il a habité un temps à La Haute Rue.
1915
Lefèvre Georges Gustave Louis né le 19/01/1880 à Beauvais, mort de ses blessures le 05/03/1915 à Valmy et inhumé dans cette ville (Marne). Transcrit à Blacourt le 18 mars 1918. On peut aussi penser à ces corps déchiquetés, ou disparus et à leur famille qui ne « récupérèrent » pas leur défunt. Georges, ouvrier en carreaux s’était marié à 24 ans le 18 juin 1904 à Berthe Maillard, 21 ans, sans profession et résidaient tous les 2 à Blacourt. Ils eurent un fils, Henri, né le 14 Octobre 1906 qui fut fait pupille de la nation le 11/12/1918.
Gaudefroy Charles Emile né le 16/12/1880 à Epehy (Somme), tué à l’ennemi le 30/05/1915 à Soupir (Aisne) et transcrit le 28 août 1915 à Blacourt où il était domicilié en dernier lieu. Il était lépoux de mademoiselle Buleux (prénom inconnu) domiciliée à Blacourt. Peu de renseignements concernant cet homme.
Cartier Ambroise Auguste Emile, grand (1,71 mètre) blond aux yeux bleus, né le 15/04/1881 à Blacourt, mort pour la France le 03/10/1915 à Sommepy-Tahure (Marne) et transcrit à Blacourt le 10/02/1916. Cultivateur, domicilié ainsi que ses parents à Blacourt. Il avait épousé le 6 août 1904 Marie Dupont (16 ans et 3 mois) sans profession et résidant aux Landrons commune d’Espaubourg.
Blondel Winceslas Gaston Hyacinthe Alphonse né le 09/07/1884 à Villembray, mort pour la France le 06/10/1915 à Souain (Marne), transcrit à La Chapelle aux Pots le 21/12/1915. Cultivateur de 1,56 mètre, châtain aux yeux gris, il avait épousé à 23 ans en 1908 à Blacourt Georgina Montoille, une couturière de 18 ans. Le couple domicilié à Blacourt eut un fils Georges né le 31/05/1908, pupille de la nation.
Leclerc Lucien Paul. Très peu de renseignements sur ce soldat né le 10/01/1893 à Blacourt et mort pour la France le 29/06/1915 à Saint-Rémy-la-Calonne (Pas de Calais) et transcrit à Blacourt le 19/08/1922. Disparu dans la tranchée de Calonne. Il était célibataire et avait pour profession aide maréchal.
1916
Boquelet Zéa, ouvrière en carreaux s’était mariée le 5 juillet 1902 à Perrault Fernand Louis Gédéon, 1,68 mètre, châtain clair aux yeux marron lui aussi ouvrier en carreaux. Il avait vu le jour le 27/01/1879 à Blacourt et a trouvé la mort le 04/02/1916 à Boësinghe (Belgique). Zéa s’est retrouvée veuve avec 4 enfants à charge. Deux filles, Marguerite et Lucienne, n’ont vécu que quelques semaines (dont l’aînée des enfants). Fernand est né le 26 janvier 1915 puis René le 30 juillet 1906 et enfin deux filles : Alfrédine le 12 août 1910 et Andréa le 31 juillet 1912. Le décès de Fernand a été transcrit à la mairie le 1er mai 1916.
Geffroy Adolphe Honoré est inscrit sur le monument et pourtant rien ne semble le rattacher au village. Peut-être y a-t-il résidé un temps mais en tous cas pas avant son départ pour le front. 1,62 mètre, blond aux yeux gris, il était né le 01/11/1880 à Tillé. Boulanger puis domestique agricole il avait épousé à Boutancourt (Oise) le 1er juin 1909 Marie Roman, domestique agricole également. Une fille leur était née avant mariage le 22 février 1908, situation régularisée par l’union. Blessé le 1er mai 1916, amputation de la cuisse, il meurt le 11/05/1916 à Revigny-sur-Ornain (Meuse) et la transcription est faite à Notre-Dame-du-Thil.
Fontaine Jules Henri, châtain aux yeux bleu clair, ouvrier céramiste, né le 15/07/1891 à Senantes et domicilié en dernier lieu à Blacourt avec ses parents. Il était célibataire. Tué à l’ennemi le 25/09/1916 à Assevillers (Somme), décès transcrit à Blacourt.
1917
Care Henri Louis Léon, né le 21/10/1895 à Blacourt, célibataire, habitant dans le village chez ses parents. 1,68 mètre, châtain aux yeux marron, cultivateur, mort pour la France le 20/04/1917 à l’ambulance (mort de ses blessures) le 20/04/1917 à Beaurieux (Aisne). Transcription le 8 avril 1917 à Blacourt.
Duchaussoy Marcel né le 22/12/1897 à Blacourt, employé de commerce, châtain foncé aux yeux bleu clair mesurant 1,69. Il meurt le 11/05/1917 à l’ambulance à Oeuilly (Aisne). Ses parents habitaient Beauvais où la transcription est faite le 21 août 1917.
Mahaut Eugène Saturnin, châtain clair aux yeux gris, 1,63 mètre est mort en captivité (du 03/09/1914 à sa mort) le 07/11/1917 à Langensalza en Allemagne. Il était né le 29/11/1877 à Senantes et s’était marié à 25 ans à Saint-Aubin-en-Bray. Il exerçait la profession de cultivateur et vivait en dernier lieu à Blacourt. Eugène était père d’une fille décédée à 6 mois en 1912. La transcription de son décès est ajoutée dans une mention additive le 5 janvier 1921.
Poret Alphonse Maurice Georges né le 22/09/1887 à Gournay-en-Bray. Charcutier domicilié d’abord à La-Chapelle-aux-Pots puis en dernier lieu à Blacourt où il avait épousé à 24 ans, Marie Berthe âgée de 16 ans et demi, charcutière. Un fils leur est né pendant la mobilisation du père, le 2 mai 1916 prénommé Georges (qui trouva la mort au combat en 1940…). Alphonse est mort pour la France le 17/10/1917 à Aizy-Jouy (Aisne), décès transcrit à Blacourt le 2 février 1918.
Dauboin Raymond Marie. Pour lui aussi l’inscription sur le monument de Blacourt est un mystère. Raymond, né le 23/05/1873 à Saint-Germer-de-Fly et résidait ainsi que ses parents à Feuquières. Mesurant 1,67 mètre, cheveux et yeux châtain clair, il avait épousé le 23 mars 1899 Marie Moncomble à Marseille le Petit. Il meurt d’une pleurésie (contractée au front) le 09/03/1917 à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis ex Seine-et-Oise). Transcription dans cette ville.
1918
Poret Charles Gustave Eugène. Peu de renseignements sur ce garçon né le 30/07/1896 à Doudeauville (Seine-Maritime, ex Seine-Inférieure) et mort pour la France le 11/06/1918 à Autheuil-en-Valois (Oise). Charles était cultivateur à Blacourt et la transcription est notée en cette mairie le 26/08/1918.
Varnier Louis Lucien né le 23/07/1893 à Villembray et résidant à Blacourt. Célibataire d’un mètre soixante-huit, châtain aux yeux bleus, il était ouvrier agricole au lieu-dit l’Avelon. Prisonnier rapatrié à Blacourt, mort le lendemain de son arrivée, soit le 28/12/1917 d’une maladie contractée en captivité.
Coeffier Pierre. Né à Blacourt le 09/07/1877, cultivateur et son épouse Agathe Cocu domiciliés à Blacourt. Pierre est décédéà l’hôpital militaire (nous ignorons où) et la transcription est notée le 3 janvier 1919 à Blacourt.
Leleu Georges Châtain aux yeux bleus d’un mètre soixante-neuf résidait à Viller-Saint-Barthélémy mais dont les parents habitaient Blacourt. Georges exreçait la profession de charretier et il est mort pour la France le 14/02/1919 à l’hôpital militaire de Strasbourg d’une maladie contractée en service. Décès transcrit à Blacourt le 17/09/1919.
Angrand Jules. Hélas, nous n’avons trouvé aucun renseignement le concernant pas plus que pour Lefèvre Ernest, les deux sont inscrits comme disparus.
Le crime du garde-chasse Clovis Lambert
Dans les années 1920, en 1923 pour être précise, un fait divers a ébranlé le village. Le crime du garde-chasse Clovis Lambert. Nous connaissons cette affaire grâce à l’ouvrage écrit à ce sujet par Daphné Guillemette. Nous joignons la présentation que nous en avions faite, lors des journées du Patrimoine à Blacourt en septembre 2022.
Résumé de l’affaire « Le crime de Blacourt ». (Daphné Guillemette)
Nous sommes le 27 novembre 1923 à Blacourt.
A cette époque, Blacourt comptait, d’après le recensement de 1921, 379 habitants, en additionnant ceux du village centre, et la « population éparse », c’est-à-dire les hameaux comme La Haute Rue, l’Avelon, Montreuil, les Landrons, le Bray de Haute Rue, le Bray de Montreuil et La Boissière.
Massire était maire du village et avait pour adjoint M. Duval.
Fulgence Desmarest était maître de l’école des garçons et Gabrielle Bruno dirigeait celle des filles.
C’est à priori un village tranquille dans lequel la population exerce des métiers essentiellement liés à l’agriculture. Environ 117 agriculteurs, beaucoup de femmes sont ménagères, on trouve un charretier, 2 charrons, un marchand de veaux mais aussi un certain nombre d’ouvriers d’usines et des ouvriers potiers et céramistes, ce qui n’est guère étonnant dans notre région. Blacourt possédait également une carrière d’où on extrayait la pierre.
En ce qui concerne les commerces, il y avait au moins une boulangerie, une épicerie, une marchande de brosses etc.
Daphné Guillemette nous parle dans son ouvrage d’un hôtel près de la gare, d’un petit restaurant à l’arrêt de Blacourt et de débits de boissons.
Mais, après cette brève présentation, revenons au 27 novembre 1923. Je résume ici l’histoire racontée par Mme Guillemette.
Clovis Théophile Lambert, 44 ans, est garde-chasse. Il a été embauché par M. Cantrel, propriétaire. Celui-ci l’a engagé en tant que garde particulier pour s’occuper de ses propriétés situées dans le bois de Blacourt où M. Cantrel venait chasser avec ses amis.
Clovis avait encore son père, âgé au moment des faits de 70 ans, il avait épousé en 1902 Marie-Louise Grouchy décédée en 1922. Le couple avait eu un fils prénommé également Clovis, âgé de 16 ans et ils habitaient Espaubourg. Au moment du crime Clovis Théophile avait une nouvelle compagne prénommée Rosella.
Ce mardi 27 novembre il faisait froid, la neige commençait à tomber. Le garde-chasse comptait poser des pièges dans le bois.
En fin d’après-midi, en ces lieux où on l’a retrouvé 3 jours plus tard, couché sur le dos, Clovis Lambert fut tué d’un coup de feu, à l’arrière de la tête.
Le commissaire Léon Carré de Beauvais est dépêché sur les lieux et s’installe dans la caserne de gendarmerie de Blacourt.
Clovis a-t-il surpris un braconnier ? On sait que son employeur lui avait fait des reproches sur ses fréquentations (il buvait des pots avec des gens dont on savait qu’ils étaient braconniers). Ces remarques l’avaient affecté. Il se devait donc d’être plus sévère dans son travail et moins conciliant.
Au début de l’enquête du commissaire Carré, 3 noms se détachent comme pouvant être celui de l’assassin potentiel : Rozé, filleul de la victime et braconnier à ses heures, tout comme Mercier et Leleux pour les mêmes raisons.
Rozé paraissait être un bon candidat dans la mesure où un bruit avait couru dans le village selon lequel Clovis était souvent venu voir Marthe, la femme de son filleul pendant une absence de 2 mois de celui-ci.
Mercier, manouvrier, marié et père de 2 enfants avait un casier judiciaire mais cela n’en faisait pas un assassin.
Les 2 furent vite éliminés de la liste du commissaire.
Joseph Leleux paraissait être un client plus sérieux. Clovis lui avait dressé un procès-verbal quelques mois avant sa mort et son alibi était problématique. Dans sa jeunesse il avait commis quelques délits. Leleux avait donné un faux emploi du temps et il assurait qu’il n’avait plus mis les pieds dans le bois de Blacourt depuis 2 ans. Le jour du crime, Il prétendait être allé chasser le lapin, puis être passé au château où il était entré par effraction, enfin, dans l’après-midi il aurait à nouveau chassé avant de travailler à la carrière. Or il a été aperçu se dirigeant vers le bois une demi-heure avant le crime, 2 témoins l’affirment mais il le nie.
Le fusil et les cartouches retrouvés chez lui correspondaient à l’arme du crime.
Avec ces éléments, le commissaire Carré fait arrêter Joseph Leleux le jeudi 6 décembre 1923. Il est inculpé d’assassinat et conduit à la prison de beauvais. Ceci malgré ses dénégations.
Le procès a lieu à la Cours d’assises de beauvais le 13 mars 1924.
Maître Gilles, son avocat commis d’office est une pointure. Avec beaucoup de conviction et de talent, il démonte complètement les résultats de l’enquête. Pour lui, pas d’aveux, pas de témoignages directs, pas de preuves matérielles, que des hypothèses et des suppositions. Instillant le doute dans l’esprit des jurés, maître Gilles obtient l’acquittement et la libération de son client.
L’affaire de l’assassinat du garde-chasse Lambert ne fut jamais éclaircie. Quelques mois après sa mort, par souscription, les populations de Blacourt et d’Espaubourg firent élever dans le bois une stèle en sa mémoire.
Dans cette affaire, l’auteur évoque la caserne de gendarmerie de Blacourt. Nous n’en avons trouvé aucune trace. Peut-être s’agissait-il de la « caserne des pompiers » qui fut utilisée à cette fin.
L’éclairage public
En passant, on peut évoquer l’électrification de la commune : l’éclairage public de Blacourt est assuré par la société Nord Lumière, concessionnaire d’Etat en 1936.
La seconde guerre mondiale
Pour terminer cette étude du XIXè et du premier XXè siècle, il nous reste à évoquer la seconde guerre mondiale.
Trois noms apparaissent sur le monument aux morts.
Lors de la campagne de 1940, Georges Aristide Albert Poret trouve la mort à Troyes (Aube) le 22/06/1940. Il était né le 02/05/1916 à Blacourt pendant la mobilisation de son père, Alphonse mort pour la France en 1917… Les deux sont gravés sur le monument… Albert s’était marié le 14 mai 1936 à Colombes (Seine).
1944
Caux Robert. Il existe bien un Caux Robert soldat mort pour la France à Dortmund (Allemagne) mais il n’est pas de Blacourt et nous ignorons s’il s’agit de celui inscrit sur le monument aux morts.
1945
Joly Mérovée Aimé né le 15/11/1919 à Ons en Bray et mort pour la France le 13/04/1945 à Miche Uber Malerte. Il avait le statut de militaire et appartenait au 150è régiment d’infanterie.
Nous n’avons hélas pu trouver de plus amples renseignements.
Sous l’occupation
Par contre, un ouvrage « Un réseau d’évasion dans l’Oise à Auneuil » d’Henri Maigret nous apprend que quelques habitants de Blacourt ont prêté main forte à la Résistance, au péril de leur vie.
Cet épisode permet d’apercevoir quelques traces de la vie à Blacourt sous l’occupation.
En effet, l’auteur de ce récit était instituteur à Blacourt. Henri Maigret 20 ans en 1943, appartenait au réseau d’évasion Alsace qui a permis le passage en Espagne d’un certain nombre de français et le sauvetage d’environ 120 aviateurs alliés. Son pseudo était « Bébert » et il travaillait avec son chef Gilbert Thibault huissier à Auneuil, fondateur du réseau en 1943, Roger Fontaine d’Ons en Bray et Yvonne Delplanche. Les parents d’Henri avaient une ferme à Lhéraule et son beau-frère Gaétan Hucleux en avait une à Goulancourt-Senantes.
Le 6 septembre 1943 (à l’époque, les écoliers étaient encore en vacances) des B17 « forteresses volantes » américaines passent au-dessus de la région et l’un des bombardiers s’écrase vers Lanlu. Le pilote est tué et une dizaine de parachutistes « descendent » du ciel. Les plus proches tombèrent à Amuchy et Blacourt. En fin de journée, la sœur d’Henri, Fernande Hucleux et la bonne polonaise Frotzina vont traire dans une pâture au lieu-dit « Le Bray de Goulancourt ». Elles trouvent dans la grange un aviateur américain blessé. Les deux femmes le nourrissent et le soignent. A Blacourt, malgré une relative pénurie, on mangeait à sa faim mais on souffrait de l’absence des prisonniers. Henri le prend en charge et l’amène dans sa classe (de nuit bien sûr) au centre du village. Sa classe a été aménagée à la hâte, à la rentrée d’octobre 1942 dans la salle à manger de l’ancien presbytère depuis longtemps inhabité. Il se trouve au fond de la cour de l’école close par de hauts murs qui l’isolent de la rue (ce qui est pratique pour cacher un clandestin). Son collègue, Armand Dubromel, occupe le logement de fonction de l’autre côté de la cour et utilise comme dépendances, le reste du presbytère où il a aménagé un poulailler et des clapiers. Mis au courant par Henri, il aida à nourrir l’aviateur.
D’autres parachutistes eurent moins de chance, l’un d’eux a atterri sous le nez des allemands à La Chapelle aux Pots et fut donc arrêté. Les autres se sont égayés.
Le fait de cacher un aviateur allié était extrêmement dangereux, on risquait l’arrestation, parfois la torture, l’exécution ou la déportation. Il fallait trouver une filière pour le convoyer jusqu’à Paris et de là par d’autres réseaux, faire en sorte qu’il retourne en Angleterre. La formation des aviateurs était longue et coûteuse, aussi les alliés tenaient-ils à récupérer leurs hommes tombés en France (ou ailleurs).
Henri finit par entrer en relations avec une organisation. Un certain « Zéphyrin » vient le voir. C’est Fernand Dupetit, serrurier à Beauvais, chef d’un groupe de Résistance, qui va s’occuper du transfert. Voyage compliqué et dangereux. Il fallait trouver des tenues civiles à ces garçons de grande taille… . En octobre 1943, Marcelle Petit épouse de Marceau Petit, un ancien de 1914/1918 blessé à Verdun et qui travaille à Gournay en Bray vont l’aider. Ils habitent une maison de Blacourt, près de la mare, en face de la forge. Cette femme s’adresse à Henri Maigret, mue par une intuition car elle a récupéré un autre parachutiste, planqué dans une grande cheminée fermée, transformée en placard.
Zéphyrin revient et le 9 novembre 1943, l’emmène et cet aviateur est pris en charge à Paris par le réseau Comète.
Là va s’arrêter l’évocation de Blacourt sous l’occupation, car après cette action, très vite Henri Maigret est convoqué pour Le STO (Service du Travail Obligatoire en Allemagne). Il n’a pas l’intention d’honorer la convocation. Il demande à son collègue Dubromel de faire croire au village qu’il a été arrêté à la sortie d’un cinéma à Beauvais et il plonge dans la clandestinité. Henri va désormais travailler avec le réseau de Gilbert Thibault à Auneuil, puis à la Libération, il est appelé à l’armée (classe 1943) et fut démobilisé en mars 1946. Il reprit sa carrière d’instituteur mais pas à Blacourt.
Conclusion
En conclusion, nous dirons que d’une certaine façon, il a été très émouvant sinon de faire revivre, du moins de réveiller la mémoire de tous ces habitants de Blacourt. Anonymes ou plus connus, ils ont laissé une trace que nous avons tenté de suivre avec beaucoup d’intérêt et de respect.
Véronique Decayeux.